« La participation du consommateur au processus de servuction »
ETORE Caroline
INTRODUCTION P. 2 à 3
I – CARACTERISTIQUES DE LA SERVUCTION P. 4 à 14
1 - Qu’est ce que la servuction ? p. 4
2 – Caractéristiques du système de servuction p. 5
3 – Un système sans élément matériel p. 6
4 – Evaluation de la qualité d’un élément immatériel p. 7 à 9
5 – Un élément matériel dans le réseau p. 10 à 14
II – DEFINITION DU CONCEPT DE PARTICIPATION P. 15 à 21
1 – Les différentes notions de participation p. 15 à 20
A – De la notion de contact à celle d’interaction p. 15 à 17
B – Participation active ou passive p. 18 à 20
2 - Vers une définition synthétique de la participation p. 21
III – FONCTIONS, FORMES ET DIMENSIONS DE LA PARTICIPATION P. 22 à 31
1 – Fonctions et formes de la participation p. 22 à 23
2 – Dimensions de la participation p. 24
3 – La relation de service p. 24 à 28
4 – Modification du rôle du personnel en contact p. 28 à 31
IV – LES DETERMINANTS ET INTERETS DE LA PARTICIPATION P. 32 à 39
1 – Les facteurs de motivation du consommateur p. 32 à 36
2 – Implications psychologiques de la participation p. 36 à 37
3 – Eléments de mise en situation p. 37 à 38
4 – La socialisation du client p. 38 à 39
CONCLUSION P. 40
BIBLIOGRAPHIE P. 41
Dans un contexte de recrudescence de la concurrence, les entreprises sont contraintes de trouver des moyens pour rivaliser avec les politiques de prix agressives. De ce fait, la problématique de la qualité des services ne fait que croître car la différenciation des entreprises repose de plus en plus sur la qualité des prestations et la recherche de la satisfaction totale du client. Ainsi, au niveau des activités tertiaires, les stratégies commerciales s’orientent le plus souvent vers une intensification du lien prestataire - client. D’ailleurs aujourd’hui, l’essentiel de la valeur ajoutée est réalisée dans le secteur des services. L’optique relationnelle est donc une opportunité pour les entreprises de services.
Durant les deux dernières décennies, les sociétés de services ont encouragé les clients à effectuer plus de travail. Dans les entreprises de services tels que les banques, la vente au détail et les centres de loisirs, les clients contribuent de plus en plus au système de réalisation du service souvent pour “la récompense” en terme de réduction du prix et l'économie de temps ou, simplement pour un meilleur service. Par exemple, chez les photographes ils utilisent des machines pour reproduire, agrandir, ou corriger leurs photographies ; dans les hôtels, ils réservent et règlent eux-mêmes la note ; et même de plus en plus couramment, les clients scannent et mettent en sac leurs propres achats dans les supermarchés. Ce sont les nouvelles tendances telles que la technologie croissante et les niveaux toujours plus réduits de personnel qui encouragent un degré plus élevé de participation du client. Cette interdépendance entre le consommateur et le fournisseur est conceptualisée comme le système de servuction.
La recherche Marketing dans le domaine des services ne peut se faire par la simple permutation du Marketing « traditionnel » à cause des caractéristiques propres des services et du système de servuction. La production de services est le résultat des interactions entre le client, le personnel en contact et/ou le support physique. Le consommateur joue un rôle de coproducteur du service.
Dans un premier temps nous déterminerons les caractéristiques de la servuctions puis nous définirons le concepts de participation du client au travers des visions de divers auteurs. Ensuite, nous étudierons les différentes formes que peut prendre cette participation en essayant de comprendre comment le consommateur participe. De plus, les consommateurs adoptant des comportements différents, il nous parait intéressant de comprendre les déterminants de la participation. Enfin, la participation est intéressante pour les entreprises du fait de la performance qu’elle procure. On comprend ainsi que les entreprises ont intérêt à éduquer leurs clients au travers d’un processus de socialisation, pour qu’ils participent de manière efficace.
La spécificité des activités de services est souvent décrite par des caractéristiques telles que l’intangibilité, l’hétérogénéité et la simultanéité de la consommation et de la servuction. Nous définirons ainsi le système de servuction puis nous étudierons les caractéristiques des activités de services, ainsi que l'organisation du système et l'évaluation de sa qualité.
Concevoir et fabriquer un produit fait référence à un ensemble de processus qui porte le nom de "production", mais il n'existe pas d'équivalent pour les processus de création et de fabrication des services.
C'est pourquoi le concept de "servuction" a été crée. Ce concept marque l'existence d'un système qui intègre des mécanismes et démarches ayant des points communs avec ceux de la production mais qui est tout de même particulièrement adapté à la nature des services et au comportement des clients dans une relation de service. Il est donc fondamental de considérer la place centrale du client dans le mécanisme de fabrication du service et la spécificité de son rôle.
De façon synthétique nous pouvons dire que le terme "servuction" marque la nécessité d'envisager la production avec des démarches spécifiques à celles de la production de biens. Nous pouvons définir la servuction comme l'ensemble des processus mis en œuvre pour que le service se réalise.
Il convient alors de donner une définition du terme service :
C'est à la fois l'objectif du système mis en œuvre et la résultante de l'interaction entre le client, les supports physiques et le personnel en contact. Il a pour but de satisfaire les besoins du client.
Pour comprendre les spécificités de la servuction, il faut d'abord comprendre la logique du système de production. Dans un premier temps, nous allons donc tenter de représenter cette logique et d'en déduire les lois fondamentales.
Commençons par repérer les acteurs (au sens humain et matériel) du mécanisme de production :
- des machines adaptées à la transformation de la matière première
- des employés utilisant les machines
- de la matière première à transformer
Lors de l'échange commercial, le produit existe déjà, sa production est antérieure à sa commercialisation. Ce n'est pas le cas du service qui ne se construit que pendant l'échange avec le client. Le bien produit et vendu est tangible : le client peut le voir et le toucher. Le marketing est donc fondé sur la possession future de cet objet. Mais le service est intangible, il est fondé sur une action qui a une vie éphémère. Son marketing ne peut alors qu'être différent. Un service, par exemple un concert, est intangible dans la mesure ou son résultat est immatériel (la satisfaction d´avoir passé une bonne soirée), et volatile (le service ne dure que le temps de sa réalisation en présence du client). Certains auteurs associent l´intangibilité à la non stockabilité des services.
Les processus de production d'un bien sont stables : un ensemble de personnes transforme la matière première à l'aide de moyens adéquats et en suivant des processus définis à l'avance. Le management de la production est facilité. Alors que le management du service est plus complexe, car il doit gérer l'imprévisible et prendre en compte la présence du client dans la phase de fabrication.
Le concept de servuction étant posé, il est maintenant nécessaire de tenter de le représenter sous une forme simplifiée.
Le résultat d'une demande de prestation de service dépend de l'interaction entre le bénéficiaire et le prestataire et pas seulement de la formulation de la demande et de la compétence du prestataire à y répondre.
Ainsi, pendant cette interaction, l’implication et la précision du consommateur contribueront à l’obtention d’un résultat qui sera plus près de ses attentes :
Le prestataire a besoin de l'implication du bénéficiaire pour préciser la demande.
La qualité de la réponse du bénéficiaire va conditionner la capacité du prestataire à trouver une solution.
Le déroulement et le résultat du service ont un impact sur les acteurs :
Le prestataire évalue le service en terme de dérangement, de travail…
Le bénéficiaire évalue la qualité du service
La caractéristique fondamentale des services est l’immatérialité. En effet, très souvent le résultat du service est intangible, cependant sa réalisation s’appuie sur des objets et se déroule dans un environnement tangible. Aussi, est-il nécessaire d’approfondir cette caractéristique.
Avant tout, la prestation de service est une rencontre entre le client et le prestataire et ce, malgré l’intangibilité du processus et/ou du résultat. C’est parce qu’il y a une démarche du client qu’il y a réalisation de la prestation. Sa présence entraîne souvent sa participation dans la réalisation de la prestation : le personnel en contact se voit donc assigner un rôle de pilotage de cette participation. La dimension relationnelle est un élément essentiel de la prestation de service. Cependant, cette relation de service limite particulièrement l’efficacité des méthodes traditionnelles de gestion de la qualité.
La gestion de la qualité d’une prestation de service est beaucoup plus difficile à mesurer que pour bon nombre d’activités industrielles. Cependant, son évaluation n’est pas impossible :
Le temps de réalisation de la prestation est une donnée primordiale de la qualité de la prestation. D’autant plus que l'innovation technologique et l'informatisation ont modifié la façon dont les entreprises correspondent avec leur client : gestion de la relation client, analyse des comportements, programmes de fidélisation, communication personnalisée, … Elles ont par conséquent, également changé la perception du temps par les consommateurs en les rendant hypersensible aux délais : l'enjeu de la qualité des services est l'accessibilité et l'immédiateté.
Par exemple, nous pouvons évaluer la qualité des services de transport sur l’exactitude du temps de parcours. Mais la majorité des activités de service où la demande se présente de façon aléatoire est, par conséquent, évaluée avant tout sur le temps d’attente et de réalisation de la prestation.
La qualité du service rendu dépend aussi des conditions psychologiques des acteurs. Un même service avec les deux mêmes personnes peut aboutir à un résultat totalement différent. Le résultat des interactions ainsi que la qualité du service, sont donc dépendants de l'attitude des acteurs. En ce sens, nous pouvons estimer que la qualité du service n'est pas stable dans le temps, elle de ce fait très difficile à évaluer.
Nous sommes en présence d'un système dont tous les éléments (bénéficiaire, prestataire, support) sont en interaction. Il ne faut pas oublier de prendre en compte l'Influence des autres clients qui peut influer sur la qualité du service. En effet, la présence d'autres clients risque d'interférer sur le déroulement du service d'un client.
Toutefois, l’évaluation de certaines prestations de service est beaucoup plus difficile et nécessite beaucoup plus de temps car elle s’évalue sur la durée. Par exemple, les prestations d’enseignement sont très difficiles à évaluer du fait de l’immatérialité du résultat. Plus le résultat sera immatériel, plus l’évaluation de la qualité de la prestation sera complexe.
De ce fait, l’évaluation de la qualité repose essentiellement sur la qualité du processus qui mène au résultat, plus que sur le résultat lui-même. Ceci a pour conséquence de porter notre attention à l’ensemble des éléments mobilisés dans la réalisation de la prestation (Grönroos C., 1990 ; Hensel J.J., 1990).
D’après Eiglier P. et Langeard E.(1995) « La manière dont se déroule une prestation de service pourrait être considérée comme très secondaire par rapport au résultat final. En fait, il n’en est rien. Au cours du déroulement de la prestation, le client va enregistrer consciemment ou inconsciemment des signes qu’il va associer à son expérience de la prestation globale. L’impact positif ou négatif de ces « tranches de vie » l’emporte très souvent sur l’appréciation froide et objective du résultat. »
Au final, c’est plutôt l’interaction client/prestataire/objet qui façonnera la perception de la qualité par le client.
Cette perception de la qualité par le client ne doit surtout pas être négligée par l’entreprise de service, car c’est la satisfaction de ces clients qui est la clé de la réussite de l’entreprise. D’ailleurs ces chiffres* viennent le confirmer :
91 % des clients mécontents ne reviennent jamais
pour un problème résolu sur le champ, 95 % des clients en parlent à cinq personnes,
un client mécontent le dit en moyenne à onze personnes
Alors qu’un client satisfait le dit peut être à trois personnes
il faut six fois plus de temps pour gagner un nouveau client que pour conserver un client satisfait.
*Source : http://www.qualiteonline.com
La réalisation de certains services fait intervenir des éléments matériels. Nous nous trouvons dans un système où l'évaluation du bien tangible passe par la participation du bénéficiaire. Dans le secteur marchand, nous retrouvons cette situation dans les servuctions utilisant des distributeurs automatiques.
En l'absence d'un conseiller, le résultat du service dépend de la compétence du consommateur et de la simplicité d'utilisation du matériel. Mais une mauvaise utilisation du bien va produire un mauvais résultat même si le bien n'est pas en cause. L'interaction personne/bien peut toutefois être contrôlée par l'introduction d'une tierce personne pouvant aider le bénéficiaire ou si possible, par un effort de simplification dans l'utilisation de l'appareil.
La qualité du service est plus facile à évaluer que dans l'exemple précédent. En effet, bien que la perception du résultat reste soumise à une évaluation subjective de la part du bénéficiaire, le fonctionnement stable du bien ne complique pas la survenue du résultat. Des actions semblables de la part du consommateur correspondent immanquablement à des résultats identiques en matière de service.
Jusqu'alors, nous avons mis en œuvre des réseaux tridimensionnels engendrant une interaction personne/personne ou personne/bien et une influence du service lui-même. Mais la plupart des servuctions utilisent aussi bien des éléments matériels que du personnel d'assistance. Le réseau est donc plus complexe. Analysons l'échange qui se déroule entre un client qui demande à un taxi de l'emmener, lui et ses bagages, le plus vite possible, à la gare avec son véhicule.
Dans cet exemple, nous sommes confrontés à quatre pôles : le bénéficiaire du service, le prestataire c'est-à-dire le chauffeur, l'élément Matériel c'est-à-dire le véhicule et le service lui-même qui génèrent un réseau de six interactions réciproques. Nous pouvons caractériser l'ensemble des relations en les regroupant dans six classes :
Les interactions entre le bénéficiaire et le prestataire:
Bénéficiaire et prestataire peuvent avoir une conversation utilitaire (aide à la navigation par exemple). Comme nous l'avons déjà vu dans le premier exemple, l'interaction entre les acteurs est importante dans la qualité du service, mais elle est fragile puisqu'elle est liée aux conditions psychologiques des protagonistes. Elle est toutefois à la base d'une notion importante dans les servuctions, celle de la participation du bénéficiaire à la fabrication de son service.
Utilisation du matériel par les acteurs :
Dans ce type d’interaction, il existe deux sortes de sollicitations :
La sollicitation du matériel par les acteurs. Par exemple, la manière de conduire du chauffeur, l'utilisation des facilités du véhicule par le passager.
Leur influence sur la qualité du service tient avant tout aux compétences des utilisateurs. L'évaluation de cette influence est facilitée par le fait que seul le comportement des acteurs peut être variable. Celui du matériel est constant.
Les réponses du matériel aux sollicitations des acteurs. Elles portent plus sur les capacités du matériel à répondre aux exigences des deux utilisateurs. Elles ont une influence indirecte sur la qualité du service.
Adéquation du matériel par rapport au service
Cette interaction marque directement une influence des caractéristiques et des possibilités du matériel sur le résultat du service. Par exemple, un casier de vestiaire trop petit pour contenir un sac de sport, des vêtements, des accessoires… signe immanquablement un résultat négatif du service demandé ou nécessite un ajustement (agrandissement, multiplication de la quantité…) qui a des conséquences sur le service. Il semble alors évident que la stratégie d'adaptation du matériel aux contraintes du service trouve rapidement ses limites (même en installant de nouveaux casiers la surface de la salle ne pourra pas en contenir beaucoup plus !). C'est l’adaptation du service à la cible donnée, qui permet d'éviter une inadéquation des éléments matériels et du service.
Les conséquences du service sur le matériel
Ce sont les conditions définies pour la réalisation du service qui ont une influence sur les éléments matériels impliqués. Par exemple, véhiculer un client, entraîne une usure du véhicule et, être obligé d'aller vite augmente la consommation d'essence. Afin de garantir un service de qualité, il faut assurer la maintenance et le renouvellement du matériel utilisé pour la réalisation de ce service, ce qui entraîne des coûts.
Les attentes du service par les acteurs
Le prestataire doit cerner les attentes du bénéficiaire avant la réalisation du service. Le résultat de l'échange est, en final, évalué par ce dernier sur la base de la satisfaction de ses besoins. C'est la raison pour laquelle la plupart des méthodes de marketing mettent l'accent sur la nécessité d'une segmentation réelle de l'offre. Dans le cas des services, cette règle est primordiale.
L'évaluation du service par les acteurs
L’évaluation du résultat de ces interactions se fait par le bénéficiaire. Le service étant, par nature, fabriqué pendant l'échange, il est nécessaire d'admettre que l'évaluation tient compte du déroulement du service. Enfin, la perception du résultat de l'échange est toujours le produit de l'interaction des différents éléments. Par exemple, bien qu'il soit arrivé à l'heure à la gare, le client peut être très mécontent du voyage en voiture, parce que la climatisation du taxi ne fonctionnait pas et que sa discussion avec le chauffeur s'est révélée plutôt ennuyeuse. En somme, la perception d'un service n'est jamais facile à appréhender.
Suite à l'étude que nous venons de faire, nous pouvons proposer un modèle à quatre pôles qui a surtout comme caractéristique d'introduire le client dans les interactions qu'il génère.
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Support physique : ensemble des éléments nécessaires à la production des services aux clients. Par exemple : moyens de transport, outils, système informatique…
Client : sa présence est toujours obligatoire en prestation de service.
Service : Dans un système de service, le client participe au processus de production par son adhésion.
Personnel en contact : Ensemble du personnel embauché par l'entreprise dont le travail est d'être directement en contact le client.
L'organisation interne de l'entreprise : La présence obligatoire de l'entreprise, mais de façon non visible par le client, est généralement appelée "back office" ("front office" en contact avec la clientèle).
Ce modèle met en évidence les propriétés de la servuction :
La fabrication et la consommation du service sont simultanées
Le client est présent dans le mécanisme de fabrication.
Le service est le résultat d'un ensemble de relations réciproques entre les pôles
Notons que ce modèle est centré exclusivement sur la fabrication d'un service précis pour un client unique et qui nécessite la mobilisation du personnel et du matériel nécessaire. La création des processus et du matériel sont forcément conçus avant le service lui-même, il faut donc prendre en compte cette unicité et être capable de s'adapter à la spécificité de toute servuction.
L'organisation interne a une influence sur le personnel en contact et le support physique. En effet, quelque soit le degré de contact entre le client et le personnel, ce dernier donne de l'information au premier. Il est important pour l'entreprise de connaître ses clients, et ce à tous les niveaux de l'organisation pour une meilleure qualité du service.
Nous allons donc étudier la façon dont a évolué la
participation et comment elle est définie par différents chercheurs puis nous
analyserons l’interaction bénéficiaire / prestataire / objet, au travers de la
participation du client et du rôle du personnel en contact.
II - définition du concept de
participation
La notion de contact du client (Chase, 1978) définit comme « la présence physique du client dans le système ». Cette présence peut être mesurée comme le pourcentage de temps pendant lequel le client doit être présent par rapport au temps total nécessaire pour le servir.
L’intérêt de mesurer le contact avec le client est de mettre en évidence des problèmes d’efficacité des entreprises de services.
Ainsi, plus le contact est élevé et plus le processus de servuction est difficile à contrôler et à rationaliser. En effet, l’action du client n’est pas toujours prévisible, il existe une part importante d’incertitude dans le rôle joué.
Inversement, moins le contact est élevé, plus l’entreprise de service se trouve dans un univers certain permettant d’accroître l’efficacité. Il existe ainsi une relation inverse entre contact avec le client et efficacité.
Conséquence fondamentale : le résultat de ce qui est produit par l’entreprise n’est plus de son seul ressort. La qualité du processus et du résultat dépend donc du client lui-même et de son implication dans le processus. Plus la participation du consommateur est élevée, plus la qualité du résultat dépend de son implication dans la réalisation de la prestation.
Une classification des entreprises de services peut ainsi être proposée.
Puisque l’efficacité est liée au degré de contact avec le client, trois groupes d’entreprises de services ayant un contact croissant et une efficacité décroissante sont déterminés :
les services quasi-manufacturés : le contact physique avec le client est restreint (exemple : les sièges sociaux de banques)
les services mixtes : faible contact avec le client mais celui-ci est tout de même présent dans le processus
les services purs : ils requièrent un contact fort avec le client pour produire le service (exemples : hôtels, restaurants, soins médicaux…)
Cette approche avec la notion de contact est très managériale mais est également très critiquée notamment par Schmenner (1986) et Wemmerlöv (1989).
La notion d’interaction (Schmnner) est la combinaison de deux éléments qui décrivent la participation du client :
le degré avec lequel le client intervient dans le processus de servuction. Un degré d’intervention élevé correspond à une forte possibilité pour un client d’intervenir activement dans le processus.
le degré avec lequel le service est « customisé » pour le client. Un service offrant un degré de customisation élevé va permettre de satisfaire de manière individuelle les préférences de chaque client.
Cette dernière notion ajoute une dimension supplémentaire à la notion de contact développée par Chase.
En effet, ici la participation du client passe par une détermination d’offre de service propre à chacun des clients. Un contact long n’est pas suffisant pour indiquer une forte interaction du client avec le service. Il est vrai que pour la plupart des services les deux dimensions vont de paires, mais ce n’est pas toujours le cas : les agences de voyage par exemples ont une durée de contact relativement élevée avec leur client mais proposent des offres plutôt standardisées.
Pour Wemmerlöv, le contact entre l’entreprise de service et le client peut être de trois natures différentes :
absence de contact direct entre le personnel et le client présent dans l’activité de service (exemple : les distributeurs automatiques)
contact direct entre le client et le personnel mais avec une interaction faible c'est à dire une participation passive du client.
contact direct entre le client et le personnel mais avec une interaction forte, c’est à dire une participation active du client.
Nous en concluons que la notion de contact (Chase) est insuffisante pour déterminer les différentes situations de participation du client au système de servuction. Cette insuffisance est notable, notamment dans le cas de la distribution automatisée. En effet, d’après la formule de contact proposée par Chase, plus le ratio du temps de présence du client par rapport au temps nécessaire pour servir le client est élevé plus le contact est élevé et par conséquent considère le processus de servuction difficile à contrôler et à rationaliser alors qu’en réalité ce processus est facilement maîtrisable et rationalisable.
Ainsi, les critiques émises par Schmenner et Wemmerlöv paraissent justifiées et contribuent à la détermination du concept de participation grâce à l’association de deux dimensions supplémentaires :
le degré de contrôle du processus par le prestataire
le degré de participation plus ou moins active du client dans le processus.
B - Participation active ou passive
Afin de mieux comprendre la définition de la notion de contact, nous nous attacherons à comprendre les différentes formes que peut prendre la contribution du client. Aussi, nous ferons la distinction entre la participation active et la participation passive.
Silkapit et Fisk (1985) définissent la participation comme : « le degré d’effort et d’implication à la fois physique et mental du client, nécessaire pour participer à la production et la mise en disposition du service ». D’après ces auteurs la participation peut être représentée de la façon suivante :
Participation et degré d’activité du client
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Ainsi, la faible participation du client correspond à sa faible présence dans le système, c’est donc un client passif, il n’apporte aucune valeur ajoutée.
Inversement, la participation élevée du client correspond à un profil de client actif, c'est-à-dire qu’il apporte une valeur ajoutée à l’opération, celle-ci ne pouvant être réalisée sans sa participation.
La notion de participation peut être approfondie : d’après Langeard (1980), en croisant la nature de la participation et celle de la relation : « au plan de la participation, il y a un continuum actif-passif, au plan de la relation il y a un continuum dominant-dominé».
D’après le même auteur : « quantité de clients sont dominés par l’entreprise de service dont ils cherchent à obtenir une prestation. […] Les causes les plus fréquentes de domination sont le manque de choix, l’urgence ou un grand écart entre la compétence du professionnel et celle du client. »
Cependant, il faut tenir compte du comportement plus ou moins actif des clients : «On encourage nettement la participation active du client,[…] mais il restera toujours des consommateurs passifs qui souhaitent être pris en charge, et qui souhaitent être dominés. » (Eiglier et Langeard, 1987)
Le schéma suivant est une représentation de la participation proposée par Eiglier et Langeard (1987). Nous remarquons que les auteurs identifient une « zone conflictuelle ». Cela signifie que pour eux qu’il y a un risque de conflit dans une situation où un client actif est dominé. D’après eux : « un client qui accepte de participer activement à la réalisation du service ne va pas supporter longtemps d’être dominé par l’entreprise de service »
Cette vision de l’approche en terme de client passif ou actif et de dominant ou dominé permet d’approfondir la définition de la participation.
Bon nombre de chercheurs ont donné leur propre définition de la participation.
Marion (1996) définit la participation comme : « la contribution du client à la réalisation du service impliquant sa présence et / ou son intervention active ». D’après lui, la participation se caractérise par trois éléments essentiels :
des opérations clairement identifiées
le degré d’activité du client pour la réalisation de chacune de ses opérations
le contexte de la participation et les conditions qui la rendent possible.
A partir de cette définition, Orsingher (1997), explique la participation comme le travail que le client doit effectuer pour obtenir le service, de la mannière suivante : « pour le client, la participation au service représente l’ensemble des tâches, d’opérations, qu’il doit accomplir dans un contexte déterminé pour obtenir la prestation de service ».
Après cette étude nous pouvons mieux appréhender la participation. Elle est définie dans un premier temps comme le contact entre l’entreprise et le client ou la contribution du client au processus de production a évolué vers une notion plus large d’interaction. Dans un second temps, différentes formes de la participation ont été établies par plusieurs chercheurs, proposant ainsi diverses sortes de participations allant du client passif au client actif.
Enfin, les chercheurs distinguent aujourd’hui une notion beaucoup plus synthétique de la participation qui se définie comme le travail que le client doit effectuer pour obtenir le service désiré
Les services sont souvent très complexes, une addition d'interactions, d’échanges et d’exécutions entre les employés de service et les clients de service. Selon les situations et les clients, la participation peut prendre des dimensions différentes. Nous verrons ainsi quelles en sont les formes et fonctions puis nous nous intéresserons à la mesure de la participation en identifiant les dimensions.
Dans certains cas, la participation du client est primordiale au service quel qu’il soit; le consommateur de services est alors considéré comme “un employé partiel” de l'organisation du service. D'autres études font référence au fait que, bien que le service puisse ne pas être dépendant de la participation et de l'interaction du client, le niveau de qualité qu’un client reçoit et par conséquent sa satisfaction, avec l'expérience, peut être améliorée par celle-ci.
Pour Eiglier et al. (1979), trois fonctions peuvent être associées à la participation :
la spécification du service est l’expression des désirs et besoins du client.
la réalisation du service peut se faire par de l’information ou une l’action, le client peut être amené à réaliser une partie du service.
le contrôle de la qualité du service : Lorsque le système le prévoit, le client peut donner son avis sur la qualité du service.
Les auteurs précisent ensuite que la participation, au-delà de ces points d’application, se décompose entre information et action.
Cette idée est reprise par Langeard (1980) pour qui la participation peut être de trois formes différentes :
Participation physique : « il s’agit de la participation physique du client au système de servuction qui se substitue au personnel dans l’exécution de tâches manuelles simples. »
Participation intellectuelle : « dans la société de service, les consommateurs ne disposent pas seulement de leur force physique, mais aussi d’un niveau élevé de connaissance des situations. »
Participation affective : Elle est très importante pour l’entreprise : « cette forme de participation a des effets durables sur l’état d’esprit et la disponibilité du personnel en contact, sur le contrôle des opérations par les responsables et sur la communication qui s’établit entre l’entreprise et ses clients-membres. »
Ce fractionnement de la participation est utile d’un point de vue conceptuel mais, dans la réalité, il n’est pas facile de dissocier ces trois points. La participation se définit plutôt comme un concept tridimensionnel où les trois formes se combinent. Il s’agit plutôt de connaître l’importance respective de chacune des participations.
Concernant les formes de participation, Marion (1996) introduit la notion de complexité qu’il définit comme « la réalisation, par le client, d’opérations qui ne sont ni standardisées ni contrôlables par le prestataire ». Pour l’auteur, la participation intellectuelle est la plus complexe. Mais il existe en réalité deux complexités différentes qui se cumulent : « la complexité théorique de la participation liée au degré de standardisation et de contrôle des opérations par le prestataire, et la complexité réelle pour le client, liée à sa capacité à réaliser ce qui est attendu de lui. »
La participation une fois définie, reste complexe à comprendre dans son ensemble. Langeard (1980) propose d’en trouver les dimensions. Selon lui, il est possible de distinguer sept dimensions à la participation qui peuvent être synthétisées en 3 groupes :
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Performance
l’efficacité obtenue
le risque que quelque chose ne marche pas
le
contrôle de la situation par le client
Processus
le degré de dépendance du client vis-à-vis d’autrui
la somme de contacts humains nécessaires à la prestation
l'effort exigé du client
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le temps nécessaire
La relation de service est associée à un système d’interactions. L’interaction entre le prestataire, son personnel en contact et ses clients entre en jeu dans la finalité du système. Cette finalité a pour objectif la satisfaction du besoin du client.
Pour Langeard et Eiglier (1987) le système de servuction comprend sept éléments qui interagissent entre eux.
Il s’agit de quatre éléments de base :
- clients,
personnel en contact,
support physique,
service
Et de trois autres qui influencent également le fonctionnement du système :
système d’organisation interne,
autres clients,
autres services.
Loverlock (1992) poursuit cette analyse descriptive en évoquant le chevauchement de trois systèmes :
marketing,
mise à disposition
et opérations.
Ces deux approches mettent clairement en évidence le fait que le service est une résultante d’un ensemble d’interactions et, en même temps, d’une finalité du système.
Mais il est également nécessaire d'envisager l'influence des clients eux-mêmes les uns sur les autres.
Par exemple, dans une file d'attente pour une activité de saut à l'élastique, un client peut être stressé par la présence (et l'impatience), derrière lui, d'un autre client qui attend son tour en faisant des commentaires. Ce dernier client peut lui-même être victime de la peur que manifeste le client qui le précède. Ce phénomène de contagion peut être parfois positif dans un groupe.
Nous notons qu'une bonne gestion des "relations clients" associée à la gestion traditionnelle Client, Support Physique et Personnel en contact, est à l'origine de ce que nous appelons l'ambiance. Par exemple, Le Club Med a particulièrement soigné cet aspect dans la conception de ses servuctions.
Nous pouvons alors définir différentes formes de relations présentes dans un système de servuction.
Les relations primaires : ce sont les relations dues à la servuction avec un client. Elles marquent l'interaction des éléments de base : clients, personnel en contact, support physique et service. Les interactions qui s'instaurent entre ces moyens et ces auteurs sont nommés "relations primaires".
Les relations internes : ce sont les relations qui sont internes à l'entreprise de service. Les fonctions internes à l'entreprise (comptable, logistique, administration…) génèrent des interactions avec les éléments du service contrôlés par l'entreprise. L'organisation interne peut influencer les relations primaires.
Les relations de concomitance : ce sont les relations qui s'établissent entre les clients, ainsi que les conséquences qui en résultent au niveau de leurs services respectifs.
D’après Gronroos, nous pourrions ajouter aux 4 P du marketing deux variables supplémentaires :
Le marketing interne : l’entreprise de service doit former son personnel dans l’optique de la satisfaction des clients.
Le marketing interactif : favoriser une bonne interaction acheteur - vendeur car la qualité du service en est fortement dépendante.
Cette dernière proposition met l’accent sur l’importance de la relation acheteur – vendeur. Et notamment sur l’importance d’entretenir une relation de qualité avec le client puisque celui-ci à un rôle important dans la servuction.
En effet, nous avons pu voir que la principale caractéristique de la vente d’un service réside dans l’importance de la participation du client qui est à la fois acteur et bénéficiaire de la prestation.
Les relations issues des activités de services sont de deux sortes, il existe :
Les relations opérationnelles : elles font référence au degré de collaboration entre le consommateur et le vendeur pour la réalisation du service.
Les relations sociales : C’est le degré de contrôle qu’a le prestataire sur l’action.
Une relation de service est le résultat de différentes rencontres entre les acteurs impliqués dans sa réalisation. Elle est organisée autour de trois étapes principales :
1 – Une démarche de la par du consommateur qui est à la base de la mise en oeuvre du système de servuction. Il définit sa requête auprès du prestataire de service.
2 – Une relation durant la mise en oeuvre de la prestation qui est sous la responsabilité du prestataire et qui fait intervenir le client selon différents degrés possibles à la coproduction.
3 – L'appréciation du déroulement du processus de servuction et de son résultat par le client.
La relation de service s'apparente d'abord à une interaction entre le prestataire et le client dont le besoin ne peut être satisfait sans une offre immatérielle. Des degrés de contrôle (copilotage) et de participation (coproduction) à la réalisation du service sont définis en fonction de la nature du service et des aptitudes et volonté du consommateur et du prestataire.
Il est alors question d'un processus interactif initié par la phase de définition et de lancement de la prestation, puis par la réalisation de cette prestation jusqu'à son résultat dont la qualité et le déroulement sont appréciés par le client.
Ces différentes interactions ont modifié peu à peu le rôle du personnel en contact.
La participation du client a pour effet une modification du rôle du personnel en contact avec celui-ci. Sa mission première est de superviser la participation du client. Les qualités requises pour ce rôle sont d'ordre relationnel, elles contribuent fortement à la qualité de la prestation et par conséquent à la satisfaction du client. L'appréciation de la qualité passe aussi par l'évaluation positive du personnel par le client, par exemple il jugera de façon plus ou moins consciente, la tenue vestimentaire et l'aspect physique. Parmi les critères d’évaluation de la qualité portant sur le personnel en contact, les clients identifient également la courtoisie, l’empathie. Ces éléments affectifs, esthétiques et socio - psychologiques sont des éléments extra - marchands très difficilement maîtrisables par l'entreprise et pourtant importants dans le jugement que portera le client sur la prestation de service. Certaines entreprises de services cherchent à homogénéiser l’aspect physique du personnel en lui imposant un uniforme, mais ce type de gestion n’est pas possible pour toutes les catégories de prestations.
Prenons l'exemple d'une entreprise d'assurance : lors d'un sinistre le client attendra de la part de sa société de services d'assurance, qu'elle traite et exécute techniquement une gamme de contrats, qu'elle règle financièrement et au plus vite le sinistre, mais également qu'elle rende services. Le client ne se base donc pas simplement sur la façon dont va se dérouler la prestation pour apprécier celle-ci.
Nous nous pencherons donc sur les composantes de la relation de services et sur les conséquences qu'elle implique en terme de gestion.
La décision d’achat est généralement prise avant la réalisation de la prestation. Le client a donc un lapse de temps d’attente pendant lequel il va se faire une représentation du service qui lui sera rendu. Ces représentations sont propres à chaque client et varient selon les expériences vécues ou rapportées, la réputation qu’il attribue à l’entreprise et des réseaux sociaux de relation. De plus, la performance du personnel en contact peut être variable pour plusieurs raisons :
Une mauvaise compréhension des attentes du client
Une faute du personnel
La dimension extra - marchande de la prestation
De ce fait, l’incertitude sur la qualité de la prestation est d’autant plus grande qu’elle est relative à des personnes et non plus à un support matériel ou à son résultat. La relation de service est donc beaucoup plus compliquée que la relation marchande.
Dans l’intention de s’entendre de façon plus précise sur la prestation et son résultat, les professionnels ont mis en place des éléments communs afin de faciliter la définition de la qualité et son évaluation. Ces éléments définissent tout d’abord la prestation qui fera l’objet de l’échange entre le client et le prestataire. Ainsi, les attentes du client sont structurées et le niveau de qualité attendu est plus précis.
En effet, si la même définition est partagée par le client et le professionnel, alors un dialogue sur sa réalisation peut s’établir sur des bases communes et évite des conflits d’interprétation du résultat dans la mesure ou le client et le prestataire sont d’accord sur ce qui doit être réalisé et le type de résultat attendu.
Ces éléments communs, appelés codes, définissent ensuite le rôle du prestataire et du consommateur. Cela permet en cas de conflit de définir la responsabilité de chacun. Notons que le consommateur n'a pas toujours conscience de participer à la réalisation de la prestation et que cette situation est préférable pour le prestataire mais peut aussi créer des ambiguïtés. La nécessité de cerner la responsabilité du professionnel est capitale dans le domaine des prestations de services.
En effet, ces services portent souvent sur des recommandations ou des solutions que le client doit mettre en œuvre. Dès lors, la responsabilité juridique du professionnel est une obligation de moyens et non de résultat.
Les éléments sur lesquels les clients portent leur attention peuvent être résumés en cinq critères principaux :
la tangibilité : lorsque les prestations comportent des éléments tangibles, les client sont sensibles à l'apparence et à la présentation de ces éléments. C'est par exemple le cas des téléphones mobiles.
La fiabilité : le consommateur attend un certain niveau de qualité, toujours égal, d'où l'intérêt de le standardiser.
La réactivité : le client se rendant généralement sur le lieu de production du service (coiffeur, distributeur…) accepte de plus en plus mal les délais d'attente et l'absence de réactivité du prestataire.
Le professionnalisme : le client est exigeant en matière de conseil et d'information sur le service proposé (exemple du voyage)
L’empathie : l'accès au service doit être le plus aisé possible tant en terme de structure d'accueil que de compétence du personnel. La communication joue ici un rôle primordial.
Tous ces critères portent sur les compétences du personnel à s’adapter à chaque situation, à chaque demande et à chaque profil de client.
L’indépendance et la transparence sont également des préalables nécessaires à la réalisation d’une prestation de qualité :
L’indépendance du professionnel donne la garantie au client que les différents moyens qui seront mis en œuvre seront le résultat d’un choix conscient et non imposé par des fournisseurs.
La transparence permet au client de vérifier que le prestataire n’a pas exagéré certains frais. Pour les prestations immatérielles, ce point est important, car il y a peu d’éléments qui permettent au client de juger de la valeur de la prestation.
Après avoir découvert ce qu’était la relation de service, quelles étaient les fonctions, formes et dimensions de la participation et les conséquences sur modification le rôle du personnel, nous pouvons désormais analyser les raisons de la participation du consommateur au système de servuction.
Comme nous l'avons vu précédemment, tous les clients ne s'investissent pas de la même façon dans le processus de servuction. Certains seront actifs, d'autres pas du tout, mais pour quelles raisons ?
L'intérêt pour une entreprise de faire participer ces clients est qu'elle y gagne plus qu'elle ne dépense. Mais le consommateur y trouve également son compte. Nous allons donc dans un premier temps montrer que la participation est effectivement une source de performance pour les entreprises et de satisfaction pour les consommateurs, pour enfin analyser comment on peut inciter le client à participer de manière efficace.
La participation du client dans la réalisation du service est une idée quelque peu surprenante de prime abord. Non seulement le client paie pour le service mais il doit, en plus, donner de son énergie et de son temps pour obtenir satisfaction. Pourtant, nous vivons quotidiennement des situations de ce type et nous y trouvons, en tant que client, des intérêts certains. Pour comprendre ce paradoxe, il nous faut comprendre ce qu'était la réalisation d'un service, il y a une centaine d'années.
Dans les années 1930, le commerce type était une boutique close, constituée d'un long comptoir et d'immenses étagères inaccessibles aux clients. Les clients sont obligés d'attendre leur tour pour être servi. On achète un ½ litre d'huile, celle que la boutique possède, on se renseigne sur l'existence d'un produit parce qu'on ne voit pas se qui se trouvent sur les étagères, on demande un prix parce qu'il n'y a pas d'affichage et on patiente parce qu'il n'y a pas d'autres solutions que d'attendre que la liste de la cliente précédente soit épuisée.
Aujourd'hui, le client déambule dans les rayons, choisi sa marque, rempli son caddie, compare les prix, lit les notices d'informations, repose un produit qui ne lui convient pas, demande un vendeur pour compléter son information, fait trois fois le tour du rayons légumes avant de renoncer à en acheter, …Pendant ce temps, des dizaines d'autres clients font la même chose, alors qu'il y a plus de clients que de vendeurs.
La liberté du client dans un supermarché et sa participation à l'échange commerciale paraissent aujourd’hui naturelles, pourtant elles ne datent pas de très longtemps.
Un intérêt d'abord économique
Les années trente, ont été une période de grande crise économique dans notre histoire. Le pouvoir d'achat est bas, les clients sont sensibles aux différences de prix, et les entreprises ne peuvent baisser leurs marges qu'en allégeant les charges salariales. Le libre service est donc né de la nécessité de faire travailler le client pour augmenter les gains de productivité.
Un intérêt marketing
Finalement, le client a trouvé un intérêt dans ce nouveau rapport dans l'échange commerciale : une plus grande autonomie, une liberté de choix, la possibilité de comparer sans subir la présence du vendeur, de toucher la marchandise mise à sa disposition. En voulant réduire le personnel en contact, le libre-service a montré que le client était demandeur d'une plus grande autonomie et de moyens lui permettant de réduire son incertitude vis à vis de ses achats. En définitive, la possibilité de participation est un facteur de satisfaction.
L'importance de la participation du consommateur et son impact sur la perception de la qualité du service sont une notion relativement récente. Pendant longtemps, les spécialistes en marketing ont pensé qu'elle nuisait à la qualité du service. Mais ils admettent aujourd'hui que le client à conscience que sa participation a un impact sur le coût du service et veut en être, en retour, le bénéficiaire, notamment par la réduction des prix des produits. Le succès des commerces vendant les produits sur palettes, sans souci de présentation et en accroissant la participation du client, ne semble pas démentir cette position.
Mais il est nécessaire de relativiser l'équation "participation = satisfaction". Tous les clients ne sont pas prêts à accepter ce rapport dans les situations commerciales. La position d'un même client peut varier en fonction de la nature du service. Tout n'est donc pas si simple. Essayons de caractériser les facteurs qui influencent l'acceptation de la participation des clients.
La culture du client : Le niveau de participation du client est lié à sa culture. Ce n'est certainement pas par hasard que ce nouveau rôle du client soit né aux Etats Unis. Les traditions européennes marquées par l'individualisme et le conservatisme ne pouvaient pas être le terreau de cette révolution. Le cas de la restauration rapide est, à cet égard révélateur. Son importation dans nos pays est entièrement liée à son attractivité auprès des adolescents heureux de bousculer les valeurs établies des restaurants traditionnels. Depuis, bon nombre de restaurants traditionnels ont adopté un buffet en libre-service.
La durée du service. Elle n'engendre pas le même rapport à la participation. Il semble presque évident de dire que les services nécessitant une longue implication du client (une consultation chez un médecin, un vol long courrier, …) s'accompagnent d'une participation plus active des clients.
Il semble que cette règle puisse être étendue aux services à forte fréquentation dont la régularité permet l'instauration d'un climat particulier.
La complexité du service : Elle ne favorise pas la participation du client. La perception d'une certaine technicité, la méconnaissance des règles, … rendent le client plus passif. On notera que ces aspects peuvent faire l'objet d'un effort de l'entreprise de service pour faciliter l'utilisation du service et donc favoriser la participation.
La mise en oeuvre de services innovants. Celle-ci doit être accompagnée de mesures incitatives à la participation. En effet, certains clients acceptent très facilement des nouveaux services et veulent y jouer un rôle, mais une grande partie reste circonspecte.
Nous avons vu que d’après Langeard, il existe sept dimensions à la participation. Ce sont ces dimensions qui permettent de faire la distinction entre les différents niveaux d'implication des clients.
Les dimensions qui pousseront les consommateurs à être actifs sont :
le temps nécessaire
l’efficacité obtenue
le contrôle de la situation par le client
Inversement, les dimensions qui inciteront les individus à être passifs sont :
l'effort exigé du client
le risque que quelque chose ne marche pas
Donc, si nous voulons que nos clients participent activement au processus de servuction, nous devons mettre en avant le gain de temps et le contrôle du processus.
Le niveau de participation du client au système dépend aussi de :
Sa coopération : c'est sa volonté de réaliser une partie de la servuction.
Son apprentissage : c'est le résultat d’un processus qui montre au consommateur ce qu’on attend de lui et comment il devrait le faire.
Sa disponibilité : correspond au temps que le consommateur peut passer à faire ce qu’on lui demande.
Cependant, ces dimensions ne sont pas les seuls éléments d'influence sur le comportement du consommateur. Il faut également tenir compte des traits de caractère, du concept de soi-même, des besoins et du rôle social perçu par le client. L’importance perçue du service influence l’implication mentale et physique du client.
La contribution du client au processus de servuction est un sujet d'intérêt pour tous les services marketing (Silpakit et Fisk, 1985 ; Langeard et autres, 1981). Les sociétés doivent décider soigneusement d'une stratégie de participation du client, celle-ci peut avoir des répercutions psychologiques sur sa satisfaction. En effet il existe trois hypothèses :
Si le consommateur participe fortement au processus et que le résultat de l’expérience de service est supérieur à ses attentes, alors celui-ci sera moins satisfait du travail de la firme que celui qui ne participe pas à la production.
Si le consommateur participe fortement au processus et que le résultat de l’expérience de service est inférieur à ses attentes, alors celui-ci sera aussi satisfait du travail de la firme que celui qui ne participe pas à la production.
Si le consommateur participe fortement au processus et que le résultat de l’expérience de service est celui attendu, alors celui-ci sera aussi satisfait du travail de la firme que celui qui ne participe pas à la production.
Il y a ainsi bel et bien une influence psychologique sur la satisfaction du client selon sa participation plus ou moins active au processus et selon les résultats obtenus. Il est donc important de prendre en compte ces répercutions psychologiques pour ne pas faire participer le client de manière inutile.
Les facteurs de situation sont également susceptibles d’influencer le comportement du client. En effet, d'après Silpakit et Fisk (1985), il existe cinq facteurs d'influence à la participation du client :
L’ambiance sociale : Un client est plus enclin à participer si le personnel en contact est agréable ou si un esprit de communauté se crée parmi les clients.
L’ambiance physique : Ce facteur concerne l'espace, les locaux, la localisation…
La perspective temporelle : Elle concerne à la fois le moment de la journée et le temps disponible pour l’achat. Les individus fortement participatifs attribuent une grande valeur à la dimension temps.
La définition des rôles : selon le rôle dans lequel le client se trouve au moment de l’achat et selon la raison d’achat, la participation du client au service ne sera pas la même.
Les états antécédents : cet élément correspond à l’état d'esprit dans lequel se trouve le client au moment de la consommation.
Ces cinq facteurs influencent fortement la volonté du client à participer.
De par la multitude de facteurs déterminants de la participation du client, il est très difficile d'influencer l'implication du consommateur au système de servuction. Cependant, les entreprises ont tout intérêt à essayer d'agir sur le comportement des consommateurs.
En incitant le client à participer à la servuction, c'est-à-dire à réaliser une partie du service par lui-même, les entreprises économisent du temps et des frais de personnel. Cependant, cette participation n'est pas à elle seule une condition suffisante à la réussite de l'entreprise. Il faut prendre en compte le degré de qualité de celle-ci. La participation n'est efficace que si le client fait réellement ce que l'entreprise attend de lui. Pour parvenir à ce but, les sociétés peuvent mettre en place une démarche de socialisation du client.
La règle de base de cette "socialisation" est la clarté de l'explication des étapes que doit suivre le client. Le processus de socialisation peut être définit comme le « processus par lequel les membres d’une organisation apprennent le comportement, les valeurs et les attitudes attendus d’eux et qui sont nécessaires à leur participation […] en particulier, les processus client à travers lesquels les individus acquièrent les compétences, le savoir, et les attitudes inhérents à leur rôle dans les opérations de service. » (Mills, Chase et Margulies, 1983)
Le client par le biais de la socialisation apprend son rôle et améliore la précision de ses attentes. Cela permet aux entreprises de mieux répondre aux attentes et ainsi d’accroître la probabilité de satisfaction du client. Si le client comprend le rôle qui lui est attribué et qu'il s'y implique fortement alors il y a de très fortes chances que la qualité du service soit assurée. Ainsi, l'implication du consommateur au système de servuction est importante pour sa propre satisfaction et pour l'efficacité de l'entreprise.
Pour conclure, nous retiendrons que la bonne compréhension par le consommateur du travail qui est attendu de lui peut affecter deux éléments :
le niveau d’efficacité du système
le niveau de qualité du service perçu par le client
Cependant, il n'existe pas de moyens de mesurer l'impact de la socialisation.
Nous avons vu que pendant l’expérience de service, le client joue un rôle. Il a été vu successivement comme simplement en contact, puis en interaction et enfin comme co-producteur du service auquel il participe plus ou moins activement. Nous comprenons mieux à présent l’importance de la compréhension de sa participation, qui est l’objet d’un enjeu majeur pour les chercheurs et managers d’entreprises de services. En effet, l’intérêt est grand de décomposer la participation pour en connaître ses formes et dimensions.
De même, nous avons vu qu’il était nécessaire de comprendre dans le comportement des consommateurs ce qui influence la participation et quels sont les déterminants de celle-ci qui font que certains clients sont plus ou moins participatifs. L’objectif de cette compréhension est de pouvoir, par la suite, influencer la participation car elle est source de gains de productivité et d’efficacité pour les entreprises.
Le meilleur moyen que les entreprises et chercheurs ont trouvé pour faire participer le client efficacement est de le socialiser.
Ainsi, la participation est un champ du comportement du consommateur atypique et encore peu exploré. Il est notamment intéressant de se pencher sur la quantification des relations positives mises en évidence entre participation et efficacité et entre participation et satisfaction / qualité perçue par le client.
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